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Lettre au Président de la République française / Demande de mesures fortes et concrètes pour mettre fin à l’agression israélienne contre le peuple palestinien
Monsieur Emmanuel MACRON
Président de la République
Palais de l’Élysée
55 rue du Faubourg Saint-Honoré
75008 PARIS
Paris, le 31 août 2025
Objet : Demande de mesures fortes et concrètes, en amont de l’AG de l’ONU, pour mettre fin à l’agression israélienne contre le peuple palestinien. Demande de rendez-vous.
Monsieur le Président de la République,
Vous avez, le 24 juillet, annoncé officiellement que la France allait reconnaître l’État de Palestine lors de la prochaine Assemblée Générale de l’ONU en septembre. Nous prenons acte de cette décision, de sa portée politique et de son caractère irrévocable, en observant qu’elle arrive bien tard et que les engagements demandés préalablement à la partie palestinienne sont totalement asymétriques. Nous notons aussi que d’autres États ont l’intention de suivre cette initiative, ce qui peut être salué comme un succès diplomatique.
L’urgence aujourd’hui est de sauver le peuple palestinien des massacres et de la famine. Face à un génocide, il faut des actes, tout de suite, l’action n’est pas une option, c’est une obligation !!
L’opération militaire menée par l’État d’Israël depuis plus de 22 mois contre la population palestinienne de Gaza, sous les yeux du monde entier, est une insulte à l’humanité. La famine, sciemment organisée par l’État d’Israël alors que les secours attendent depuis des mois dans les pays voisins, s’ajoute aux bombardements incessants qui visent délibérément la population civile - femmes, enfants, médecins, secouristes, journalistes, artistes -, à la destruction totale de toutes les infrastructures vitales, à l’instrumentalisation de l’aide humanitaire transformée en piège mortel pour ceux qui tentent d’y accéder.
Et maintenant Israël, malgré les mises en garde de l’ONU et de la plupart des États, met à exécution son plan pour investir la ville de Gaza et en déplacer la population déjà bombardée, épuisée, le plus souvent réfugiée dans des abris de fortune.
Depuis le 26 janvier 2024, la Cour Internationale de Justice alerte sur le risque plausible de génocide, ce qui oblige tous les États signataires de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, dont la France, à agir pour y mettre fin. Depuis lors, les plus grandes ONG internationales, et plus récemment israéliennes, de défense des droits humains, ont attesté de cette terrible réalité déjà documentée par les experts de l’ONU.
Et dans le même temps, en Cisjordanie, dont Jérusalem-Est, les agressions conjointes meurtrières de l’armée et des colons se poursuivent, la colonisation se poursuit à un rythme effréné, et la Knesset a voté à une large majorité une résolution pour l’annexion de la Cisjordanie.
Dans une impunité totale, avec l’appui actif des Etats-Unis et en l’absence de sanctions de l’Union européenne, et de ses États membres dont la France, l’État d’Israël viole en permanence le droit international, et ne fait pas mystère de son projet de déporter ou d’éliminer la population palestinienne. C’est une honte pour l’humanité, qui va durablement marquer notre siècle.
Vous avez-vous-même évoqué « une honte » à propos de la famine organisée à Gaza, et mis en garde contre un « désastre annoncé » à propos de la nouvelle offensive israélienne contre la ville de Gaza. La France « condamne », souvent avec d’autres États, l’Union européenne se contente d’un accord symbolique - et non appliqué - sur l’entrée de l’aide humanitaire. Ces prises de position sont sans effet sur l’État d’Israël qui intensifie ses bombardements contre la population de Gaza, persiste à refuser aux agences de l’ONU l’ouverture de Gaza à une aide massive pour enrayer efficacement la famine qu’il a délibérément provoquée, et lance une nouvelle phase de son offensive contre la ville de Gaza. La Bande de Gaza est toujours fermée aux journalistes internationaux, tandis que les journalistes palestiniens sont délibérément pris pour cible et assassinés.
Au lendemain de la réunion du Conseil de Sécurité du 10 août, qui n’a adopté aucune résolution, vous avez évoqué une « mission de stabilisation sous l’égide de l’ONU », en application de la déclaration de New-York de fin juillet. Mais les contours de cette mission restent flous, et toujours soumis à une décision du Conseil de Sécurité, donc au veto des États-Unis. Nous vous demandons de réaffirmer clairement les objectifs que l’on doit attendre d’une telle mission : l’imposition d’un cessez-le-feu et du retrait des troupes israéliennes, l’ouverture de Gaza à une aide humanitaire massive sous l’égide de l’ONU, aux équipes de soutien au système de santé palestinien, aux journalistes et aux enquêteurs internationaux, l’évacuation des blessés, la libération de toutes les personnes détenues.
Nous vous demandons aussi d’être à l’initiative d’une telle mission de protection en mettant en œuvre les mécanismes (notamment l’ « union pour le maintien de la paix » qui permet une décision au niveau de l’AG de l’ONU [1]) permettant de s’affranchir du véto des États-Unis au Conseil de Sécurité, ou à défaut en prenant une initiative multilatérale.
Nous vous demandons de prendre enfin des sanctions pour des pressions effectives sur l’État d’Israël :
– En agissant au niveau de l’Union européenne pour la suspension de l’accord d’association avec Israël et l’exclusion d’Israël du programme Horizon Europe,
– En mettant fin à toute livraison d’armes et de composants militaires à Israël ou à des entreprises d’armement israéliennes, et en interdisant leur transit par les ports et l’espace aérien français,
– En mettant fin aux coopérations universitaires ou de recherche avec Israël, dès lors qu’elles sont susceptibles de contribuer aux violations des droits humains,
– En prenant des sanctions diplomatiques.
Au-delà de ces mesures d’urgence, vous insistez à juste titre sur les perspectives politiques qui doivent retrouver toute leur place à l’occasion de l’Assemblée Générale de l’ONU de septembre, et de la Conférence internationale de haut niveau co-présidée par la France et l’Arabie Saoudite.
Rappelons que l’Assemblée générale de l’ONU du 3 décembre 2024, qui a mis au point l’organisation de cette Conférence, se situe dans la droite ligne de l’Assemblée générale du 18 septembre 2024, qui traduit par des décisions concrètes l’avis consultatif de la Cour Internationale de Justice du 19 juillet 2024 et exige d’Israël qu’il mette fin à l’occupation dans un délai d’un an. Le communiqué qui suit l’AG du 3 décembre précise notamment : « Israël est notamment appelé à mettre fin à sa présence illicite dans le Territoire palestinien occupé dans les plus brefs délais, à cesser immédiatement toute nouvelle activité de colonisation, à évacuer tous les colons du Territoire palestinien occupé et à abroger toutes lois et mesures créant ou maintenant la situation illicite, ainsi que toutes mesures destinées à modifier la composition démographique de quelque partie du Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est [2] ».
Nous tenons également à rappeler qu’aucune « solution », qu’il s’agisse de la solution « à deux États » ou de tout autre schéma, n’aura de sens que si elle se situe clairement dans le cadre du droit à l’autodétermination du peuple palestinien. Rien ne sera possible si l’État d’Israël n’abandonne pas la conception suprémaciste et raciste qui inspire sa politique (de manière flagrante depuis la loi État-Nation de juillet 2018), et ne met pas fin au régime d’apartheid qu’il impose au peuple palestinien.
Pour construire l’avenir, le peuple palestinien doit aussi retrouver le droit de choisir librement ses dirigeants politiques. Faut-il rappeler que la plupart des dirigeants palestiniens sont aujourd’hui emprisonnés ? La sinistre visite de menaces du ministre Ben-Gvir dans la cellule de Marwan Barghouthi, rendu méconnaissable par les mauvais traitements et probablement la torture, nous rappelle l’urgence de la libération de tous les prisonniers politiques palestiniens.
Nous estimons que le respect de ces exigences doit être au cœur de la Conférence de haut niveau.
Monsieur le Président de la République,
L’évidence s’impose aujourd’hui : la guerre menée par Israël contre le peuple palestinien de Gaza n’est en rien une guerre défensive, ni une guerre pour libérer les otages qui auraient pu l’être depuis longtemps par les derniers plans négociés, et pas même une guerre de vengeance : c’est une opération d’anéantissement, un plan de massacre et de déplacement de la population palestinienne de Gaza pour la priver de tout avenir et s’emparer de son territoire. Elle a atteint un niveau d’horreur qui met profondément en cause notre humanité commune et impacte durablement la société française.
Les libertés d’expression, de manifestation et d’association doivent être pleinement respectées. La lutte contre toutes les formes de racisme, dont l’antisémitisme, est évidemment essentielle, mais il est intolérable qu’elle puisse être instrumentalisée par le réseau d’influence d’Israël pour tenter de faire taire les voix qui soutiennent les droits du peuple palestinien. Les instructions aux procureurs pour l’utilisation de manière étendue de la qualification d’ « apologie du terrorisme » doivent être retirées.
La France, membre du Conseil de Sécurité et longtemps connue pour ses positions « équilibrées » sur la question du Proche-Orient, doit s’engager résolument dans la voie des sanctions contre Israël, prendre toute sa part dans la protection du peuple palestinien, et réaffirmer son droit à l’autodétermination pour construire l’avenir.
Elle doit soutenir pleinement et sans ambiguïté la justice internationale, se prononcer clairement pour la mise en œuvre des mandats d’arrêt ordonnés par la CPI, soutenir les procédures devant la Cour Internationale de Justice, mettre en cause la responsabilité des binationaux franco-israéliens engagés dans l’armée israélienne.
La France s’est honorée en accueillant des dizaines de réfugiés palestiniens de Gaza, notamment des étudiants, des universitaires, des artistes. L’interruption brutale de cet accueil pour des positions relayées par une personne qui a depuis quitté le territoire français, est une « punition collective » injuste et incompréhensible. Cet accueil doit reprendre dans les meilleurs délais.
Monsieur le Président de la République, la reconnaissance de l’État de Palestine peut constituer un moment historique si elle s’accompagne d’une action résolue pour garantir la souveraineté réelle du peuple palestinien, la fin de l’occupation et de l’apartheid, et la pleine application de ses droits inaliénables. La France, fidèle à son histoire et à ses engagements, a l’occasion d’être à la hauteur de ses principes. Elle doit saisir ce moment pour passer des paroles aux actes.
Nous vous demandons de bien vouloir recevoir une délégation de notre Collectif national sur la base de cette lettre.
Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de notre très haute considération.
Organisations membres du Collectif national pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens, signataires de cette lettre :
Agir Contre le Colonialisme Aujourd’hui (ACCA) – AFD International – Agir pour le changement et la démocratie en Algérie (ACDA) - AILES Femmes du Maroc – Alternative Communiste - Américains contre la guerre (AAW) – Anciens Appelés en Algérie et leurs Ami(e)s Contre la Guerre (4ACG) - Apel-Égalité – Association de Solidarité Inter Peuples -Association des Travailleurs Maghrébins de France (ATMF) - Association des Tunisiens en France (ATF) - Association France Palestine Solidarité (AFPS) - Association pour la Taxation des Transactions financières et pour l’Action Citoyenne (ATTAC) - Association pour les Jumelages entre les camps de réfugiés Palestiniens et les villes Françaises (AJPF) - Association des Universitaires pour le Respect du Droit International en Palestine (AURDIP) - Cedetim / IPAM - Collectif des Musulmans de France (CMF) - Collectif Faty Koumba : Association des Libertés, Droits de l’Homme et non-violence - Collectif Judéo-Arabe et Citoyen pour la Palestine (CJACP) - Collectif Paix Palestine Israël (CPPI Saint-Denis) - Comité de Vigilance pour une Paix Réelle au Proche-Orient (CVPR PO) - Comité Justice et Paix en Palestine et au Proche-Orient du 5e arrt (CJPP5) - Confédération générale du Travail (CGT) – Confédération Internationale Solidaire et Écologiste (CISE) – Droit-Solidarité – Ensemble ! Mouvement pour une alternative de gauche écologiste et solidaire - Fédération des Tunisiens pour une Citoyenneté des deux Rives (FTCR) – Fédération Syndicale Unitaire (FSU) - Femmes Égalité - Forum Palestine Citoyenneté – Gauche démocratique et sociale (GDS) - La Courneuve-Palestine – La France Insoumise (LFI) - Les Femmes en noir (FEN) – Les Écologistes EELV - Ligue Internationale des Femmes pour la Paix et la Liberté, section française de la Women’s International League for Peace and Freedom (WILPF) (LIFPL) - Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples (MRAP) –Mouvement de la Paix - Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA-A) - Parti Communiste des Ouvriers de France (PCOF) - Participation et Spiritualité Musulmanes (PSM) – Pour une écologie populaire et sociale (PEPS) –Sortir du colonialisme – Une Autre Voix Juive (UAVJ) - Union communiste libertaire (UCL) - Union des Travailleurs Immigrés Tunisiens (UTIT) – Union étudiante - Union Juive Française pour la Paix (UJFP) - Union Nationale des Étudiants de France (UNEF) – Union pour la Reconstruction Communiste (URC) - Union Syndicale Lycéenne (USL) - Union syndicale Solidaires
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